Ma grand-mère avait vu le jour en 1885 à Paris, où elle avait fréquenté l’école primaire ; elle était entrée à l’École Normale d’Institutrices
Un cahier de moleskine où elle avait noté ses impressions et ses réflexions, surtout au moment des rentrées scolaires, lors de ses débuts dans le métier, est la seule chose qui me reste d’elle, avec quelques photos de l’album familial.
Marcelle était gaie, savait tout faire, avait beaucoup de goût, arrangeant très bien son intérieur avec des moyens limités et faisant tout pour ses fils.
(Janine, amie d’enfance de Jean)
L’école sans Dieu
C’était une femme de devoir qui aimait beaucoup son métier. Elle était persuadée de la grandeur de sa tâche d’éducatrice laïque. Dans une véritable profession de foi intitulée L’école sans Dieu, elle exprimait son désaccord avec la morale religieuse traditionnelle, pour laquelle « il n’y a ni bonnes, ni mauvaises actions, il y a seulement des actes qui sont punis et d’autres qui ne le sont pas ».
Nous, maîtres sans morale d’une école sans Dieu, […] dès que l’enfant peut comprendre, nous tâchons d’éclairer sa conscience. Puis nous lui disons : Tu es libre, mais cette liberté est ce qui t’engage ; ton voisin est libre comme toi. Respecte en lui cette liberté que tu chéris ; n’y porte jamais atteinte, si tu veux avoir le droit d’exiger toujours le maintien de la tienne.
À la fin de 1929, un après-midi, après la classe, ma grand-mère était dans la cuisine et nettoyait des écharpes de soie avec de l’essence. Le chauffe-eau à gaz était resté allumé et tout a pris feu. Mon père, rentré du lycée, travaillait. Il avait tout juste 17 ans et était alors en classe terminale. Il s’est précipité pour éteindre les flammes et a couru appeler les pompiers (peu de gens avaient alors le téléphone). Ma grand-mère était profondément brûlée. Elle a agonisé dans une clinique pendant environ trois semaines, dans d’horribles souffrances.
Elle est morte le 2 janvier 1930
Extrait de « Sur les traces de Jean Gosset »
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