Auguste Vigouroux est le seul à avoir pu témoigner de l’arrestation de Jean, grâce au récit qu’il lui en a fait dans la cellule 50 de la prison Jacques Cartier de Rennes :
Jean dormant près de moi me fit la confidence de son arrestation. Il venait je ne sais si c’est de Paris ou d’ailleurs mais de passage. Puis il ne devait pas s’arrêter à Rennes mais une communication obligatoire l’obligea à s’arrêter quelques heures. Or, il rencontra un agent à lui qui avait rendez-vous avec des autorités bien placées de la Résistance bretonne et morbihannaise en particulier. Quelques jours auparavant un agent de liaison de son réseau venait d’être arrêté et avait avoué cet important rendez-vous. Le hasard donc voulu que Jean s’y trouva.
La Gestapo au lieu de trouver deux ou 3 agents s’aperçut immédiatement que le coup était beaucoup plus important. L’agent qui était avec Jean courut dans la rue, jean le suivit, puis ils rentrèrent tous deux dans un café. Ce fut leur perte. Pris au piège, ils se laissèrent arrêter sans résistance. Je dois vous rappeler que les policiers nazis firent usage de leurs armes dans la rue.
Amené à la Gestapo ils trouvèrent sur Jean une très importante somme d’argent. C’était le salaire des camarades me dit-il. Ils ne trouvèrent rien d’autre. Immédiatement il fut pris pour un agent anglais. Ses cheveux blonds, ses beaux yeux bleus, son veston croisé marron, son visage plutôt pâle et fatigué lui donnaient effectivement l’allure britannique. C’est là je pense l’objet de la torture qu’il dut subir. Il avoua connaître l’anglais. Le policier nazi lui imposa de converser ce qu’il fit d’ailleurs et émerveilla celui-ci de son accent si pur d’anglais.
Voici donc le détail de son arrestation qui n’entraina aucune autre. Étant donné qu’il n’avait pas été prévu au lieu de son arrestation, par le jeu d’une fausse carte je pense qu’immédiatement il écourta les soupçons sur son nom. Plus tard toutefois nos ennemis devaient l’apprendre.
Vigouroux indique que, lors du départ pour Compiègne, Jean et lui étaient séparés parce que classés par ordre alphabétique. Les Allemands connaissent donc son nom à ce moment-là. Ceci demeure mystérieux. Comment l’ont-ils su ? L’a-t-il lui-même dévoilé ? Cela n’a en tout cas pas eu de conséquence : il n’était vraisemblablement pas recherché sous sa véritable identité, contrairement à Cavaillès, par exemple, qui avait une notoriété comme professeur à la Sorbonne.
François Boquet a rapporté, en rentrant de déportation, que, lors de sa propre arrestation à Paris en mai 1943, on lui avait montré des photos de personnes de son réseau, notamment d’Arlette Lejeune et de Gosset. Son visage était donc connu, à Paris du moins, mais pas à Rennes ; peut-être connaissait-on un ou plusieurs de ses pseudos, mais sans doute pas le véritable nom de celui qui les portait. Il était furieux d’avoir été arrêté pour une action de peu d’importance : il n’était pas indispensable en effet qu’il assiste à cette réunion, et, on l’a vu, il était là par hasard. C’était rageant ! Mais c’était aussi une chance. Les Allemands l’ont pris « pour un agent de liaison du maquis », dit Suzanne Tony-Robert. Ils n’ont en tout cas pas reconnu en lui le chef de réseau, ni le chef de l’Action Immédiate qu’il était. C’est pour cette raison qu’il n’a pas été fusillé…
Extrait de « Sur les traces de Jean Gosset »
Témoignage d’Auguste Vigouroux :
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